Le siècle allait finir, avec lui la PenséePosait le sceau sacré sur nos droits reconquis,La Bastille croulait et sa chute élancéeEntraînait les pouvoirs détestés : Je naquis.Jeune, j’ai vu passer et s’élargir les zonesOù l’esprit, grandissant avait peine à tenir.J’ai vu tuer des rois, j’ai vu briser des trônesEt n’ai de tout ceci qu’un chant pour souvenir :Dansons la Carmagnole,Vive le son, vive le son.Dansons la Carmagnole,Vive le son du Canon !Dansons la Carmagnole ! On entend par les ruesPorter lances, fusils, rouler les lourds canons ;Ce chant monter encor par les foules accruesAcclamant des soldats à l’ombre des fanons.Pendant que des rhéteurs, sombres autoritaires,Bâtissent des pouvoirs sur des pouvoirs tombésContre les rois ligués, cohortes libertaires,Portez, portez L’Idée à des peuples courbés.Dansez la Carmagnole, et les préjugés tombent !D’autres s’en vont venir et vous dicter des loisQuand les maîtres d’hier sous le couteau succombentLes nouveaux à l’instant prennent de nouveaux droits,En vain la Liberté par le peuple acclaméeCherche à faire sur lui briller un plus grand jourLes Hébert, les Babeuf, pleïade décimée,Sous un for fratricide ont tombé tour à tour.Dansons la Carmagnole ! Les combats et les fêtesOnt entendu ce chant que le peuple enivréPromenait au milieu des luttes, des conquêtesQu’il faisait sur les rois : mais ce chant éploréVint mourir sous le pied du corse parricideDont le talon de fer tua la Liberté.Honte à l’humanité ! Quand un homme décideLui seul du sort de tous, honte à l’humanité !Les ans ont succédé, je n’ai vu que des traitresSe jucher au pouvoir : escobar couronné,Agiot triomphant. Homme, à changer de maîtresTe crois-tu comme un bœuf pour toujours destinéSera-ce donc en vain que la science éclaireLe champ de ton labour ; que do nouveaux combatsAuront lieu dans ce champ ; et quand donc la colèreFera-t-elle au pouvoir ressentir ses éclats ?Oligarques honteux à petite coudée.La liberté prévoit vos restrictives lois.Ces hommes à leur taille ont mesuré l’IdéeQui pâlit sous le faix de leurs sombres exploits.Des lois, toujours des lois, quand le peuple n’aspireQu’à marcher sans lisière, à vivre libre, enfin !À boire le soleil sans frein, l’air qu’on respireSans joug et le blé mur le fauchera sa faim !Dansons donc ! Aujourd’hui le savoir ensemenceUn grain qui. ses rayons inondent de clartés.Mon siècle est clos. Enfin voilà donc que commenceDans un ciel neuf le cycle des humanités !Tourbillons tant prédits ! Ô préjugé tu tombesAu chaos ; avec toi les pouvoirs détestésFondent et de leurs lois ont fait des hécatombes.Homme prends en la main toutes les libertés !Danse la Carmagnole,Vive le son, vive le son.Dansons la Carmagnole,Vive le son du Canon
Accueil > Chansons > Dansons la Carmagnole : le centenaire
Dansons la Carmagnole : le centenaire
Percheron, Auguste
mardi 21 février 2023, par
Texte d’Auguste Percheron (≤1890). Sur l’air : « La Carmagnole » ?
Paru dans L’Attaque : organe hebdomadaire anarchiste (1888-1890), nº 61 (1er-8 mars 1890).