1Durant que les aubes cendréesS’étendent au loin, sur les ToursDes cités d’orgueil engendréesPar l’orgueil des hommes, toujours,Les soldats, rivés à des chaînesD’acier et le fusil aux mains,Suivent de leurs maîtres les haines.Semant la mort sur leurs cheminsAlors, ce sont des cris, des pleurs,Et l’on entend des chants funèbres.Des sanglots soulèvent les cœursContre les faiseurs de ténèbres.2Durant que les soleils levantsDissipent les longues nuits grisesDans l’ombre douce des couvents,Sous les pleins-cintres des églisesLes fronts se courbent à la voixDu prêtre bateleur qui ditDes oraisons devant la CroixOu vend des lots du paradis.Puis, il y a des chants, des pleursEt l’on entend des cris funèbres ;La Vérité quitte les cœursDevant les faiseurs de ténèbres.3Durant que les soleils brûlantsFont germer les blés des campagnes,Dans de vieux palais chancelants,Les rouges pourvoyeurs de bagnesRendent leurs jugements d’horreurAu nom de la justice infâme.Ils condamnent le doux rôdeur,Le vagabond, l’enfant, la femme,Ils n’ont souci des cris, des pleurs ;Leurs yeux ont des éclats funèbres ;La pitié n’est pas dans ces cœurs ;Ce sont des faiseurs de ténèbres.4Durant que les sanglants couchantsFont des diadèmes aux montagnes,Les chemineaux, les vieux, touchants,Ont la faim, la soif pour compagnes.Ils vont, sevrés de beaux espoirs.Clamant vainement leur détresseEn la sérénité des soirs !Et la misère est leur maîtresse.Ils ont pitié de ceux qui pleurentLeur cœur est grand, leur voix funèbre— Leurs yeux sourient à ceux qui meurent,Leurs yeux voient clair dans la ténèbres !
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Les
Faiseurs de ténèbres
Rainaldy, Henri
mercredi 22 février 2023, par
Texte d’Henri Rainaldy (≤1899).
Paru aussi in : Le Libertaire, 3e série (1899-1901), in nº 6 (10-16 décembre 1899).