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Le

Premier Mai

Avray, Charles d’

vendredi 9 septembre 2022, par claude

Texte et musiquede Charles d’Avray (≤1907).
1
Voici le premier Mai, camarades debout,
Quand l’État met au jeu le peuple en est l’atout.
Faisons qu’au rendez-vous les masses soient exactes
Par le sang et le feu répandons la terreur
Le nombre a bien souvent faibli devant l’horreur
Égorgeons, égorgeons toute force accourue,
Car il faut à tout prix que libre soit la rue,
Pas d’hésitation la victoire promet,
Camarades debout, voici le premier Mai.
 
2
Voici le premier Mai, mort au gouvernement !
Le désaccord nous vient des bancs du parlement
Mort à la religion dont un abcès suppure,
Mort à ces chats-fourrés de la magistrature.
Ni d’égard, ni pitié, que pour notre salut
Rien ne soit relatif, que tout soit absolu.
Conduisons ces tyrans tout droit à la chaudière,
Que la matière, enfin, transforme la matière
C’est devant le néant que l’homme se soumet.
Mort au gouvernement, voici le premier Mai.
 
3
Voici le premier Mai, rentrons chez les bourgeois
Où l’homme trouve l’homme, il limite ses droits
Ayons des arguments, prêts à toute réplique,
Soyons brefs, soyons clairs, surtout soyons logiques
Partager le péril c’est soutenir l’action
Bourgeois ouvrez les rangs de la révolution
Si vous nous refusez d’agir en camarades,
Nous vous retrouverons devant les barricades.
Ce que la loi défend, le droit nous le permet,
Rentrons chez les bourgeois, voici le premier Mai.
 
4
Voici le premier Mai, défonçons les prisons,
Ne perdons pas de temps à des péroraisons
Pensez, ne pensez pas, mais soyez éclectiques
Moi, je suis imprégné de désirs anarchiques.
Pas plus l’aigle ici-bas que votre coq gaulois
Nul sur terre n’a droit d’échafauder des lois,
Les ans effaceront les préjugés qui roulent,
Les mots sont conventions, les conventions s’écroulent,
L’homme est irresponsable étant l’être imparfait,
Défonçons les prisons, voici le premier Mai !
 
5
Voici le premier Mai, vengeons les vrais martyrs
Sans vouloir des bourreaux, les moindres repentirs.
Le bronze des sauveurs grâce à nous va se fondre,
Souvenir et non gloire, il ne faut pas confondre,
Bientôt nos Ravachol [1], comme nos Caserio [2],
Vont faire tête-à-tête à vos Sadi Carnot.
Le temps sera pour nous un précieux témoignage
Désignant l’inconscient et nous montrant le sage,
Du mont des souvenirs gravissons le sommet,
Vengeons les vrais martyrs, voici le premier Mai !
 
6
Pourquoi le premier Mai ? Qu’importe le moment,
L’homme peut-il régler l’heure du châtiment ?
Nous avons trop souffert et sommes las d’attendre,
Puis tous les jours sont bons lorsqu’il faut se défendre ;
La paix sera l’amour dans un monde meilleur,
Et l’amour un salaire envers les travailleurs,
L’existence sera toute une poésie,
La femme n’étant plus source de jalousie ;
L’œuvre de chair ne vit que si le cœur l’admet.
Camarades, debout ! Pourquoi le premier Mai.

Paru aussi in : Le Libertaire, 4e série (1899-1901), in 13e année, nº 18 (3-10 mars 1907).

[1François Claudius Koënigstein dit Ravachol (1859-1892), ouvrier anarchiste français ; condamné après divers délits, assassinats et attentats, il fut guillotiné le 11 juillet 1892 à Montbrison (Loire).

[2Sante Geronimo Caserio (1873-1894), boulanger et anarchiste italien, a poignardé mortellement le président de la République française, Sadi Carnot, le 24 juin 1894 durant un défilé à Lyon. Celui-ci avait refusé de grâcier les anarchistes condamnés à mort.
Caserio sera exécuté le 16 août de la même année.