Un jour, en retournant la terreD’un coin de c’champ-ci où, jadis,Se trouvait l’ancien cimetièreQui reçut les vieux du pays,En retournant la terre nue,Au creux d’un sillon noir et d’or,Soudain, une tête de mortButa dans mon soc de charrue.Et, prenant dans ma main calleuse,Afin de mieux l’examiner,Cette tête à grimace hideuse,Sans lèvres, sans yeux et sans nez,J’ai rêvé de filles joliesAux lèvres donneuses d’amour,Aux yeux clairs comme un rai de jour,Pour qui j’aurais fait des folies.Voyant ce crâne à l’ossatureJaune et verte, et dont le cerveauAvait dû servir de pâtureAux vers qui vivent des tombeaux,J’ai rêvé d’un bourgeois très riche,Gros de ventre et fort d’appétit,Dont j’aurais servi, comme outilÀ faire le boire et la miche !Et jetant à travers la plaineSelon mon désir, n’importe où,Cette chose qui fut humaine,Comme on jetterait un caillou,J’ai rêvé d’un grand capitaineQui m’aurait emmené mourir…Ou faire mourir, pour servirSon œuvre de gloire et de haine !Mais, en r’trouvant soudain la têteReposant en l’ombre d’un préComme vont reposer mes bêtesLorsque mon champ s’ra labouré,J’ai rêvé du travailleur blêmePour qui l’existence est un poids,D’un pauvre bougre comme moi,Mort… comme je mourrons moi-même !Variante des quatre derniers versJ’ai rêvé d’un pauvr’ prolétairePour qui l’existence est un poids,D’un pauvre bougre comme moi,Et pieusement j’l’ai r’mise dans la terre.
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La
Chanson du laboureur
Couté, Gaston
dimanche 18 septembre 2022, par
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Texte de Gaston Couté dont une variante parait dans Le Libertaire sous le titre La Tête de mort.