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Les

Religions

Loréal, Louis

vendredi 2 février 2024, par claude

Texte de Louis Loréal (1922). Musique de Guméry.
1
Pour que toujours le gueux supporte la souffrance
Et que devant les grands il soit silencieux,
Les fourbes abusant de sa grande ignorance
Inventèrent alors les mystères des cieux
Ils dirent le très Haut qui règne sur les êtres
Exige que tu sois à nous toujours soumis
Et si tu reste bien docile envers tes maîtres
Au royaume de Dieu tu te verras admis.
Et le gueux ignorant les lois de la nature
Des menteurs accepta le domination
Si Dieu fut tout puissant c’est pauvre imposture
C’est pour servir les grands qu’on fit la religion !
 
2
Mais, petit à petit, mourut la fanatisme ;
Ceux qui ne crurent plus devinrent très nombreux.
C’est alors qu’on découvrit la patriotisme :
Des mensonges des grands ce fut le plus affreux.
Quand on sent que le gueux est las de ses misères
On décrète aussitôt la Patrie en danger.
Tout se calme, et le Peuple se presse aux frontières :
C’est entre malheureux que l’on va s’égorger.
Et pendant que les grands bâtissent des fortunes.
Chez les gueux c’est la Mort et la Désolation.
Ô, Peuples ! entre nous n’ayons plus de rancunes !
Supprimons la Patrie, infâme religion !
 
3
Puis vint quarante-huit. Alors la bourgeoisie
Inventa le trompeur suffrage universel.
Et le gueux n’en vit pas toute l’hypocrisie :
Il se crut souverain… puisque proclamé tel !
Il ne s’éclaira pas à la longue pratique ;
Il se croit tout puissant quand il est électeur ;
Il espère toujours — pauvre jouet politique ! —
Voir en son candidat l’homme libérateur.
Le candidat promet en réunion publique
Puis oublie aussitôt après son élection.
La Girouette est pour lui l’ornement symbolique.
La farce électorale est une religion.
 
4
À toute religion je reste réfractaire,
La Science a prouvé l’absurdité des Dieux.
Le bonheur je le vois sur la Terre
Quand nous aurons chassé les menteurs odieux.
Faisons abstraction de toute idolâtrie !
Que le gueux sur le gueux cesse de se ruer.
Que l’Humanité soit notre seule patrie.
L’Homme doit aider l’Homme, et non pas le tuer !
Peuple, ne crois qu’en toi, n’aies plus l’âme dévote.
Si tu veux être heureux n’attends pas à demain
Brûle dès aujourd’hui ton bulletin de vote :
La liberté se prend les armes à la main !

Publié aussi dans la revue La Muse rouge : revue de propagande révolutionnaire par les arts, nº 4 [1922].