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Poème déliquescent…

Boyer, Maurice

jeudi 15 février 2024, par claude

Texte (monologue ?) de Maurice Boyer (1936).

…pour ceux qu’ont pas de charrue…
(À notre camarade René Ruquet)

1
Si j’étais laboureur, aux champs,
Je pourrais, de l’aube au couchant,
Lancer mes espoirs dans l’espace
— Le trou du cul au vent qui passe —
Pour les petits, les miséreux,
Pour les rêveurs au ventre creux.
Les croissants pousseraient en masse.
 
(Refrain)
Laboureur, labourer, laboura, / Ton malheur un jour finira, (bis)
Hourra !
 
2
Si j’étais laboureur des mers,
Dans les sillons des flots amers,
Je voguerais vers l’Aventure
— Le trou du cul dans la mâture —
Au lieu d’embêter les requins,
Je dévorerais des bouquins :
On devient grand par la lecture.
 
(refrain)
 
3
Si j’étais laboureur des cieux,
Dans un grand rêve audacieux,
Je m’en irais à tire-d’aile
— Le trou du cul à la jumelle —
Recherchant un monde inconnu
Pour vivre heureux, libre et tout nu,
Loin de ma muse, la chamelle !
 
(refrain)
 
4
Le bonheur est bien décevant,
À toujours labourer du vent,
Au cours d’une vie harassée,
Ma rancune s’est amassée.
Pourtant, je ne veux pas, un jour,
À Sainte-Anne faire un séjour
— Le trou du cul dans l’eau glacée.
 
(refrain)
 
Envoi
Tes pauvres vers de mirliton
Seraient peut-être, à Charenton,
Plus indiqués qu’au « Libertaire ».
Enfin, si tu ne peux te taire,
Efforce-toi d’être émotif ;
ici, nous n’avons pas motif
À nous taper le cul par terre.
 
(refrain)

Sainte-Anne et Charenton : établissements psychiatriques.


Publié dans Le Libertaire, 41e année, 4e série, nº 523 (20 novembre 1936).