À Albert Dubrujeaud
1Au fond du bourbier politique,Grouillent, dans tes abjections,Certains bravis tenant boutiqueD’ignobles provocations.De ces cabotins du courage,Les ordures font exulterEt voilà d’où provient leur rageIls ne peuvent pas insulter.2Ils gueulent, mais ils gueulent jaune,Car ils croquent d’affreux marmotsNul journal ne leur fait l’aumôneDe reproduire leurs gros mots.Pour faire autour d’eux le silence,On s’entend, sans se consulter.Qu’importe leur lourde insolence ?Ils ne peuvent pas insulter.3Pauvres eunuques de l’insulte,Dans le vide ils montrent le poing.Les amis, sans qu’on les consulte,Vous disent : Ne vous battez point.Ils croient vous faire une blessure,Bah ! passez sans vous arrêter,Ignorant même la morsureIls ne peuvent pas insulter.4Gonflés par leur venin stérile,Ils souffrent de poisons rentrés.Leurs fronts qu’agrémente la bilePissent leurs courroux concentrés.Partout, comme à travers un crible,Leur pus impuissant vient juter :Ils crèveront du mal terribleDe ne pas pouvoir insulter.
13 octobre 1888