Je suis parti ce matin même,Encor soûl de la nuit mais prisComme d’écœurement suprême,Crachant mes adieux à Paris…Et me voilà, ma bonne femme,Oui, foutu comme quatre sous…Mon linge est sale aussi mon âme…Me voilà chez nous !Ma pauvre mère est en lessive…Maman, Maman,Maman, ton mauvais gâs arriveAu bon moment !…Voici ce linge où goutta maintesEt maintes fois un vin amer,Où des garces aux lèvres peintesOnt torché leurs bouches d’enfer…Et voici mon âme, plus griseDes mêmes souillures — hélas !Que le plastron de ma chemiseGris, rose et lilas…Au fond du cuvier, où l’on sème,Parmi l’eau, la cendre du four,Que tout mon linge de bohèmeRepose durant tout un jour…Et qu’enfin mon âme, pareilleA ce déballage attristant,Parmi ton âme — à bonne vieille !Repose un instant…Tout comme le linge confieSa honte à la douceur de l’eau,Quand je t’aurai conté ma vieMalheureuse d’affreux salaud,Ainsi qu’on rince à la fontaineLe linge au sortir du cuvier,Mère, arrose mon âme en peineD’un peu de pitié !Et, lorsque tu viendras étendreLe linge d’iris parfumé,Tout blanc parmi la blancheur tendreDe la haie où fleurit le Mai,Je veux voir mon âme, encor pureEn dépit de son long sommeilDans la douleur et dans l’ordure,Revivre au Soleil !…
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Jour de lessive
Couté, Gaston
mercredi 21 septembre 2022, par
Texte de Gaston Couté (avant 1902). Musique de Léo Darniderff (1924) ; puis diverses musiques : Gérard Pierron (1992), Michel Desproges (1997), Jacques Ivan Duchesne (2000), Monique Théhard (2001), Gabriel Yacoub (2002), Laurent Zoppis (2012), Max Boyer (2016), Daniel Faure, Paul-André Maby, Vania Adrien Sens.
Couté, Gaston. — La Chanson d’un gas qu’a mal tourné : poèmes et chansons. — Nouvelle éd. complétée. — Paris [France] : Seghers, 1961 (p. 61).
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