Avant de naître, déjà,Ô misère !Les pauvres sent voués àLa misère.En leurs ventres meurtris parLa misère,Les mamans font des poupardsDe misère ;Et quand le triste enfant naît,Ah ! misère !Tout autour de lui, ce n’estQue misère.Malgré tout, il grandit dansLa misère…Comme elle aiguise ses dents,La misère !À l’usine, il étouffaitDe misère ;Au régiment, on lui faitCent misères ;Mais à force de lutterEn misère.Il a fini par dompterSa misère.Hélas ! quelques jours ont luiSans misère…Voici de nouveau pour luiLa misère :Chômage, enfants — chers fardeauxDe misère —Accumulent sur son dosLa misère.À peine quelques lueursHors misère,Ont soulagé sa sueurDe misère.En proie aux terribles mauxDe misère,Sa devise n’a qu’un motLa misère.Vieux, repose-t-il enfinSans misère ?Non : toujours le froid, la faim,La misère.Sa vie entière a connuLa misère ;Il meurt, tout maigre et tout nu,De misère.La peau du pauvre est tambourDe misère.Les puissants travaillent pourLa misère ;Caserne, bagne, échafaud,Ces misère,À quiconque opprime, il fautLa misère.Aimez, gouvernants, bandits,La misère ;Tant qu’elle règne aux taudisLa misère,Elle rend obéissantsPar misèreCeux dont elle a bu le sang,La misère !Qui met le deuil aux maisons ?La misère.Et qui peuple les prisons ?La misère.La fille se prostituePar misère ;L’homme devient loup et tue…Ris, misère !Ô pauvres gens harrassésDe misère,Quand donc direz-vous : AssezDe misère !Le jour où l’on le voudra,Ah, misère !N’avez crainte : on la tuera,La misère !
La
Misère
anonyme
jeudi 13 octobre 2022, par
Texte anonyme. Sur l’air « La Terre ».
Paru dans Le Père Peinard, (2e série, nº 37, 1er-8 aout 1897)).