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Pâle travailleur

Jouy, Jules

vendredi 14 octobre 2022, par claude

Texte de Jules Jouy (1887). Sur l’air « Pâle voyageur » (= « Connais-tu l’amour ? », 1868), musique d’Antoine Renard (1825-1872), texte de Jean Baptiste Clément (1836-1903).

À mon ami Victor Nadal

— Pâle travailleur, connais-tu le Jour ?…
— Comme tout le monde, en naissant un jour,
Je devais trouver mon coin de lumière
Et goûter aussi ma part de soleil.
Mais je n’ai trouvé que l’astre Misère ;
Elle m’a pâli mon beau sang vermeil.
 
— Pâle travailleur, connais-tu la Faim ?…
— Comme tout le monde, au bord du chemin,
Je devais manger mon pain sur la Terre
Et goûter aussi ma part de vin pur.
Mais je n’ai trouvé que le vin Misère,
Et l’ogre repu rogne mon pain dur.
 
— Pâle travailleur, connais-tu l’amour ?…
— Comme tout le monde, en venant au jour,
Je devais aimer quelqu’un sur la ’l’erre
Et goûter aussi ma part de bonheur.
Mais je n’ai trouve que Jeanne Misère ;
Elle m’a vide la tête et le cœur.
 
— Pâle travailleur, connais-tu la Mort ?
— Comme tout le monde, un jour, sans remord,
Je devais pourrir dans mon coin de terre
Et me transformer en fleurs sous le ciel.
Mais je n’ai trouve que le trou Misère :
Un grand lit d’hospice avec un scalpel.

23 mai 1887


Paru dans : Jouy, Jules. Les Chansons de l’année [1887] (Bourbier et Lamoureux, 1888, p. 183-184)

Il s’agit aussi du 15e titre de la série de chansons de Jouy reprises dans le le journal d’Émile Pouget, Le Père Peinard après le décès du chansonnier. Parue ici dans la (2e série, nº 47, du 12-19 septembre 1897).