Accueil > Chansons > Chanson des bardes

Chanson des bardes

Doublier, Maurice

mercredi 4 janvier 2023, par claude

Texte de Maurice Doublier (1905). Musique par Louis-Alexandre Droccos (18..-1926).

À nos bons camarades du Groupe des poètes et chansonniers révolutionnaires

1
Voici venir la saison folle
Et de tous les cœurs en éveil
Un hosanna joyeux s’envole,
C’est le printemps, c’est le soleil !
Comme les bourgeons sur les branches
Les seins pointent plus provocants,
Et sous les chemises blanches
De longs frissons passent, troublants…
Et zon, zon, zon,
Allez nos vers et nos chansons,
Que votre joyeux babillage
Se mèle sous le vert feuillage
Au doux ramage des pinsons.
Et zon, zon, zon,
Allez rondeaux et villanelles
Après les couples enlacés,
Chanter aux oreilles des belles
Comme un orchestre de baisers.
 
2
Voici venir la saison blonde,
Le soleil a mûri le grain
Et, les moissonneurs à la ronde
Vont par les champs, la faux en main.
Hardi, les gas ! que dans l’espace
Elle brille comme un miroir,
Toutes ces gerbes qu’on entasse
C’est du bonheur et de l’espoir.
Et zon, zon, zon,
Allez nos vers et nos chansons,
Que vos rimes avec ivresse
Volent vers ceux qui sans faiblesse
Fauchent là-bas, dans les sillons.
Et zon, zon, zon,
Allez sonnets et cantilènes
Et dans la splendeur de l’été,
Faites-leur à travers les plaines
Comme un cortège de gaité.
 
2
Voici venir la saison rose,
Que de rires sur les coteaux ;
Les vendanges en sont la cause,
Partout le pampre saigne à flots.
Le vigneron, l’âme ravie,
À son tour se sent plein d’espoir,
C’est du soleil et de la vie
Qui fermentent dans le pressoir.
Et zon, zon, zon,
Allez nos vers et nos chansons,
Que vos rimes sous chaque treille
Chantent la boisson sans pareille
Que récoltent nos vignerons ;
Et zon, zon, zon,
Allez, ô modestes poèmes
Parmi le fracas des bouchons,
Que ce soit un peu de nous-mêmes
Qu’ils boivent avec leurs flacons.
 
4
Voici venir la saison blanche,
Bien que plus d’un grenier soit plein,
Comme les oiseaux sur la branche
De pauvres gens meurent de faim.
Pourtant ce que la terre donne
Ne saurait être à quelques-uns
Le pain blanc, le jus de la tonne
Sont des patrimoines communs.
Et zon, zon, zon,
Allez nos vers et nos chansons
Que vos rimes à perdre haleine,
Clament partout la fin prochaine
Des trafiqueurs et des larrons.
Et zon, zon, zon,
Les gueux veulent une part ample
De tous les trésors entassés,
Il reste encore dans le Temple
De nombreux vendeurs à chasser.

« Chanson des bardes », paroles de Maurice Doublier (1905), musique par Louis-Alexandre Droccos
Paru dans : La Chanson ouvrière : édition trimestrielle des œuvres des poètes et chansonniers du prolétariat (1905-1905), nº 1 (1905, mars).

Paru aussi in : La Chanson ouvrière : édition trimestrielle des œuvres des poètes et chansonniers du prolétariat (1905-1905), nº 1 (1905, mars).
Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k11931999

http://anarlivres.free.fr/pages/biblio/complements_texte/ChansonsDoublier.html