Accueil > Chansons > Quatorze juillet

Le

Quatorze juillet

Larivière, Pierre

vendredi 13 janvier 2023, par claude

Texte de Pierre Larivière (1906).
Allons, peuple français ! Allons, joyeux bétail,
Pavoise tes maisons, illumine tes rues ;
C’est quatorze juillet ; au prix de ton travail,
Mets tes lampions, des bannières aux avenues.
 
Rien ne sera trop beau pour fêter ce grand jour
Où ton bras vigoureux renversa la Bastille
Et sut porter la hache en ce sombre séjour
De supplices et d’horreur, de sang et de guenille !
 
Ah ! tu peux être fier de ce jour immortel
Où tu changeas de maîtres et sus rompre les chaînes
Qui enserraient le Tiers État. L’odieux Castel,
Par d’autres remplacés, doit conserver tes haines.
 
De Charybde en Scylla, de Capet en César,
De vil esclave en citoyen, de Monarchie
En République et de serf en joyeux votard,
Naufragé bienheureux, fête ton ineptie !
 
Peuple libre, viens voir tes beaux petits soldats,
Et tes beaux officiers pour commencer la fête.
Et devant ce drapeau, devant ces falbalas,
Sois fier, respectueux, bien bas, courbes la tête !
 
Peuple libre, viens voir : lupanars et prisons,
Casernes et beuglants débordent d’alégresse.
Ô peuple souverain, au bruit de tes chansons,
L’Univers étonné, juge de ton Altesse !
 
Peuple libre viens voir : ici c’est l’hôpital,
Là c’est le bagne : ici l’on meurt, ici l’on souffre !
Peuple libre viens voir encor avant le bal,
C’est l’Asile de nuit, ce pont noir comme un gouffre !
 
Peuple libre, viens voir : entre ici, car l’on boit ;
ici l’on chante, ici l’on rit, ici l’on danse
Hurrah ! hurrah ! Vive l’Absinthe, à bas le Roi !
Hurrah ! vive le Vin ! hurrah ! vive la France !
 
Peuple libre, tu es bien saoûl, tu as trop bu
Citoyen ! chante encor, pour vomir à ton aise
Pour mieux cuver ton vin, au petit jour vécu,
Dans un dernier hoquet, chante la Marseillaise !!

Paru aussi in : L’Anarchie (1905-1914), nº 66 (12 juillet 1906)