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Les

Minables

Grandidier, Louis

jeudi 16 février 2023, par claude

Texte de Louis Grandidier (≤1898).
Les gueux, les minables,
Souffrants lamentables
Vont les yeux hagards
Par les boulevards.
 

 
Errant les pieds endoloris
Avec du vent dans les entrailles,
Ils n’ont pour eux dans ce Paris
Que la faim aux dures tenailles.
 
Ils sont nombreux — des bataillons —
Qui, par tout temps qu’il pleure ou vente,
Vont grelottants sous leurs haillons
Du matin à la nuit tombante.
 
Le soir ils dorment sous les ponts,
Dans les caves ou les masures…
En tas, serrés, ils trouveront
Qu’ainsi les pierres sont moins dures.
 
Quelques-uns, pris de désespoir
Pour finir leur triste existence,
S’en vont au fond du fleuve noir
Chercher l’oubli de leur souffrance.
 
Pendant qu’ainsi souffrent les gueux,
Riches et catins font ripaille.
Et quand chantent les Gras heureux
Les Maigres pleurent sur la paille.
 
Mais craignez pour vous, ô bourgeois,
Si tous ces gueux, tous ces minables
Se redressaient tous à la fois
Et prenaient leur place à vos tables !

Paru aussi in : Le Libertaire (1895-1899), nº 149 (2-8 octobre 1898).