C’est moi l’éternel empilé,Moi, c’pauv’ diab’ qu’on nomm’ Jean Misère ;D’trent’ six mill’ façons, j’suis voléEt l’plus fort de tout, c’est qu’il faut me taire.Malheur à moi si j’hauss’ la voix,Dégoûté d’mes crapul’s sans nombre,Par motif qu’c’est contraire aux lois,On m’fourre à l’ombre.I’m’faut payer tout’s sort’s d’impôts :J’dois trimer comme un mercenairePour nourrir jug’s, soldats, sergots,Tout un tas de mecs dont je n’sais que faire.C’est pas pour défend’mon trésorQu’y a de la rousse ou du militaire,C’est, pour l’cas si ’crierais trop fort,M’coucher par terre.Y a des impôts su’ l’suc, su’ l’vin,Su’ l’sel, su’ l’beurre, su’ la ficelle,Sur c’te farin’ dont on fait l’pain,On en met mêm’ sur la chandelle,Tout en n’gagnant par jour qu’trois francs,J’paye au mêm’taux qu’un millionnaire,Aussi moi, ma femme, mes enfantsNous n’mangeons guère !En vain nous exploit’ nos patrons,Nos bistrots, nos prop’iétaires,À l’usin’toujours nous r’tournons,Comm’ d’bons moutons on s’laiss’ faire.On sait qu’c’est nous les plus nombreux,Qu’fair’ cesser tout ça serait facile,Mais ài l’heur’ d’agir, en foireux,Tous on’s’défile.
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L’
Éternel empilé
Frank, J.
jeudi 16 février 2023, par
Texte de J. Frank (≤1898).
Paru aussi — avec le surtitre « Tablettes d’un Trimardeur » — dans : Le Libertaire (1895-1899), nº 157 (27 novembre-3 décembre 1898).